Just a perfect day - Solemba

L’herbe bleue s’étend sous les pieds d’Agathe N. Young. Certains brins un peu trop aventureux viennent chatouiller ses orteils malgré ses sandales aux lanières de cuir. Elle fait lentement un tour sur elle-même pour admirer les licornes et les centaures un peu plus loin. Il parait qu’il ne faut pas les approcher car on peut se faire attaquer. Enfin… « Il parait » beaucoup de choses mais pas beaucoup sont juste. Et Agathe N. Young ne croit pas aux « il paraît », ça ne l’atteint pas. Elle ne tient pas compte de ce genre de considérations.
Alors, elle s’assoit et sort un polaroid trouvé sur Terre et photographie le paysage. Pour ne pas oublier ou parce que c’est jolie, simplement. Puis elle prend son magnéto et pose dedans la cassette et le met en route. Doucement la voix de Lou Reed commence à emplir l’espace et elle sourit en entendant les premières paroles de « Perfect Day ». Elle aime cette chanson écouter si souvent avec sa grand-mère, elle la chérie comme un petit trésor. Et ils sont si nombreux… C’est fou comme un rien peut devenir spéciale à tes yeux, tu ne trouves pas ? Alors elle s’allonge lentement et ferme les yeux. Elle sent les rayons du soleil réchauffer son petit corps. Elle voit la lumière derrière ses paupières closes et imagine un autre monde. Elle caresse l’herbe de sa main, elle est si douce. Elle reconstitue son éclat dans son esprit et la vie qui l’habite, son mouvement quand le vent vient la taquiner. C’est si calme…
Agathe N. Young ne s’endort pas comme les autres personnes dans cette situation et rien ne vient troubler cet instant. Tout semble immobile, figé alors elle s’envole. Dans sa tête, tout est noir alors elle se lève lentement et lève les mains. Toutes les couleurs qu’elle a trouvées dans les grandes plaines sont venues s’y glisser quand elle était encore dans notre réalité. Elle les regarder en riant légèrement puis souffle dessus. Alors le monde autour d’elle se teinte de couleurs chatoyantes qu’elle peut manier comme elle le souhaite. C’est comme un immense tableau qu’elle peut modifier à l’infini. Elle modèle des formes, trace des citations récoltés au cours de ses voyages. Ce n’est pas parfait, certains trouveront ça moche mais en même temps, ce n’est pas pour eux…
Puis Agathe N. Young ouvre les yeux. Il se tient juste au-dessus d’elle et il l’observe. Il a de longs cheveux noirs et des yeux rouges. Il est beau. Mas il n’est pas humain… Elle l’a deviné dès qu’elle a senti sa présence. Mais elle n’a pas peur. Elle se redresse lentement, se met debout, dépliant sa jupe à fleurs sur ses jambes. Il est grand… Elle lève la tête vers lui. Elle ne sourit pas, avec lui, il ne vaut mieux pas. Mais elle tend le bras et du bout du doigt effleure le tatouage sur son bras. Elle ne cherche ni à le surprendre, ni à le provoquer. Ce n’est pas son genre. Agathe c’est… Agathe. Elle ne parle presque pas, les mots sont bien trop précieux. Alors elle fait passer ça par les gestes. Après, l’interprétation appartient à chacun. Mais elle sait ce qu’elle risque.
Agathe N. Young regarde toute chose avec beaucoup de douceurs y compris cet homme terrifiant. Et cela montre son calme. Oui, il pourrait la tuer en quelques secondes mais à quoi bon… Tu me diras, la motivation, tout le monde peut la trouver. Mais tout meurt un jour alors aujourd’hui ou demain, peu importe ! Mais si personne n’a jamais touché à Agathe N. Young, ce n’est pas pour rien. Sûrement à cause de ce qu’elle dégage, tu ne peux pas l’attraper, c’est tout.

« C’est chaud… »

Oui, c’est tout ce qu’elle a dit. C’est une simple constatation sur la température du corps de l’homme et c’est déjà beaucoup !



[Lou Reed - Perfect Day]