Un matelot à deux têtes, deux matelots à deux têtes...

:3 :

- Qu'est-ce qui fâche tous les hommes ? - Euh... l'océan ? - Le calcul mental ? - La dichotomie du bien et du mal ? – Une femme !




Des Tatris

Le vent soufflait joyeusement dans leurs cheveux, les emmêlant sans cesse, au grand dam d’Alba qui commençait à envisager l’éventuelle probabilité de peut-être penser à les couper un peu. Les mains fermement agrippées sur la barre, la Tatris se disait qu’elle pourrait tout aussi bien se faire bronzer sur le pont tant elle ne servait à rien à l’heure actuelle. Le navire avançait tranquillement, la coque satinée brillant sous les rayons chamarrés du soleil. La mer était presque d’huile, les quelques vagues existantes se brisant sur l’immense proue en forme de tête de mort. Encore une référence à Albator, songea Tori en secouant ses mèches rebelles. Elle sourit. Leur cher père leur en avait fait voir de toutes les couleurs à son sujet, quitte à s’extasier devant Corback pendant une semaine. Il faut dire qu’en grandissant, l’oiseau s’était mis à ressembler de plus en plus à l’animal fétiche du capitaine de l’espace, pour la plus grande joie du marin. Sa gorge se serra. Cela faisait plusieurs années déjà, et pourtant il lui manquait comme au premier jour. Elle déglutit, attirant ainsi l’œillade inquiète de sa sœur d’âme. Elle la rassura d’un sourire, mais cela ne l’empêcha pas de lui prendre la main et de la serrer aussi fort qu’elle le pouvait.

Elles jetèrent un coup d’œil à Leo, qui regardait l’eau avec envie. Alba soupira, levant les yeux au ciel. Décidemment, celui-là, il était incapable de tenir en place. Néanmoins, l’absence de cap précis leur retirait tout impératif de temps, et Tori réussit à convaincre sa moitié de s’arrêter pour plonger une tête. Enfin, deux dans leur cas. [Nda : Haha, quelle belle blague, vive moi] Ils jetèrent l’ancre, qui tomba lourdement sur le sol sableux. Tranquille, confiante en leur plastique éblouissante, Alba les déshabilla d’un geste leste, déboutonnant leur pantalon d’un tour de main, le laissant glisser le long de leurs fines jambes, dévoilant leurs fesses callipyges –ou du moins à ses yeux, les autres matelots les trouvant un peu plates, tout comme leur poitrine. Ceux-ci détournèrent d’ailleurs vivement le regard, rougissants. Pas par honte ou par pudeur, juste de peur de se recevoir un couteau dans l’œil de la part du second en chef, aka Leo. Qui était d’ailleurs venu aider la Tatris à délacer sa chemise de lin, un sourire amusé plaqué sur le visage. Les joues de Tori se colorèrent légèrement, bien qu’elle soit habituée à pire, tandis qu’Alba soupirait bruyamment. Elles finirent maillot en quelques instants. Le jeune homme fit de même avec ses vêtements, constatant qu’elles ne lui rendraient pas la pareille, puis les prit dans ses bras et sauta à l’eau en criant un « TAÏUUUUUUUUT » joyeux.

Les jeunes gens atterrirent bruyamment dans l’océan limpide, cela étant dû tant aux cris de protestation de la Tatris qu’au rire tonitruant du sortcelier, sans oublier bien sûr les nombreuses éclaboussures qu’ils firent en pénétrant dans l’eau. Ils se firent bientôt rejoindre par plusieurs membres de leur équipage, les plus jeunes pour la plupart, tandis que les plus vieux fumaient des cigares autour d’une table, se remémorant le bon vieux temps, où tous ces sales gosses leur braillaient entre les pattes et cassaient régulièrement le grand mât, faisant fi des hurlements des matelots. Mais le tout formait une ambiance joyeuse et bon enfant qui perdurait encore aujourd’hui par certains aspects, cependant, le gros s’était perdu au fil des années, tandis que la Tatris avait endossé sans mot dire le dur rôle de capitaine à un âge très jeune. Autrement plus responsable que l’autre Courgette, y avait pas à dire. Leo aussi, à sa manière. Même s’il s’attachait désespérément à ses frasques d’enfant, il avait grandi trop vite, emporté dans un mélange toxique entre un amour à semi-partagé et la mort de son père, incluant de nouvelles responsabilités qu’il n’était pas certain de vouloir assumer. Bien sûr, l’équipage aurait pu prendre la relève. Ils s’y étaient d’ailleurs essayés au début, mais bientôt, ils se rendirent compte qu’ils n’étaient pas faits pour ces rôles, au contraire de ces enfants, qui y avaient été formés dès leur plus jeune âge.

Soudain, Corback poussa un cri strident et alla se jucher sur l’épaule Tori, qui tentait tant bien que mal de garder la tête à la surface. Il pointait de son bec un point au loin, qui s’élargissait à chaque seconde, laissant rapidement entrevoir un énorme canard suivi d’une petite embarcation, dans laquelle deux têtes regardaient à l’horizon, collées à un même tronc. La Tatris mit un instant à comprendre de quoi il s’agissait. Ses visages s’éclairaient en un instant. Il était tellement rare de croiser d’autres représentants de leur race à travers les mers ! Alba chasse de sa main Corback, non sans l’avoir tendrement caressé, puis s’empressa de nager à la rencontre du petit bateau. En combinant leurs efforts, ils finirent par se retrouver côté à côté en quelques minutes. Sans se soucier de ce qu’en penseraient les propriétaires, la Tatris grimpa dans le bateau et sauta sur le jeune garçon, qu’elle qualifia immédiatement de bout de chou. Dégoulinante, elle s’assit sur la barque et détailla avec curiosité le garçon d’une tête, tandis que l’autre admirait l’immense canard. « Yo ! Alba & Tori Harlock, capitaines pirates, et toi ? » s’enquit Alba joyeusement. Tori pivota immédiatement sa tête dans sa direction, surprise de cet accueil si amical. Elle avait toujours pensé que sa sœur d’âme ne se souciait de personne d’autre à part d’elles, et vaguement de l’équipage – sauf Leo, qui pouvait aller crever. Elle sourit. Finalement, son cœur n’était pas si gelé que ça. Corback les rejoignit à tire d’aile, scrutant l’autre volatile d’un œil suspicieux. « Ah oui, c’est vrai ! Qui est ce canard géant d’ailleurs ? - Vous êtes perdus ? Besoin d’aide ? » enchaîna l’autre tête. Elles se regardèrent, un peu gênées, vaguement conscientes qu’elles participaient activement au cliché du Tatris bavard, curieux, et passablement dégoulinant de bienveillance. Merde quoi, elles étaient des pirates !


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Spoiler:

Moi j’aime les patates. Tu aimes les patates ?




Le Corbeau et le Canard

Will & Tom, direction le Lancovit, accompagnés d’un canard géant nommé Kaloo. Classe. Enfin, leur nom l’était beaucoup moins, mais bon. Tori nota qu’ils ne leur avaient pas donné un quelconque nom de famille, et que la deuxième tête avait l’air légèrement angoissée. Ils échangèrent un bref coup d’œil, peut-être pour coordonner leur histoire. Tori fronça les sourcils l’espace d’un instant, avant de se détendre. Bah. C’est sûr que rencontrer des pirates, c’était pas très rassurant. Une petite sécurité ne faisait pas de mal. Mais quand même… C’était quoi ce délire de partir à l’aventure de plus en plus jeune ? Une mode lancée par la Courgette ? Oui, sans doute. Hautement ridicule. Quoique ces gamins n’avaient pas l’air au courant des dernières tendances. Peut-être une fugue. Bah. Chacun ses raisons. ET… NON PUTAIN PAS CETTE CHANSON, NON. Allez, Tori était condamnée à chanter « Chacun sa route, chacun son chemin » en silence, tout en maudissant les goûts putrides de Leo en matière de musique. [Nda : J’adore cette musique]

- A... Euh. Hé. Alba & Tori Harlock. Vous êtes des...
- ...braves voyageuses qui écument les océans avec leur fidèle corbeau sur l'épaule !
- La ferme, brolk de slurk. Vous êtes des vraies pirates ?

- Heeeiiin ? Vous... Quoi ?! Mais-mais-mais qu'est-ce que vous nous voulez ?!

Tori grimaça. Pas parce qu’ils avaient percuté avec un peu de retard, non. Juste que d’après Alba, au vu de leur renommée monstrueuse, elles n’avaient même pas besoin de se présenter. Or, l’ignorance des gamins allait foutre un grand coup à son ego. Genre, vraiment. Elle n’eut pas besoin de se tourner pour sentir son autre tête bouillonner. Merde, elle est en colère. Alba se flattait de clamer haut et fort que toute personne naviguant sur les mers connaissait les redoutables (hrrmm) capitaines pirates et leur pitoyable mais néanmoins efficace second. Et l’innocente remarque du Tatris venait de foutre en l’air sa bonne humeur.

– QUOIII ? TU OSES DIRE QUE VOUS VOUS ÊTES AVENTURÉS EN MER SANS PRENDRE CONNAISSANCE DES PLUS GRAND DANGERS QUI Y RÉSIDAIENT ? TU VEUX DIRE QUE TU NE CONNAIS PAS ALBA LA SANGUINAIRE ? QUE TU TE FOUS PAS MAL DE CREVER ? HEIN ? C’EST ÇA QUE TU VEUX DIRE ? T’ES CON OU TU LE FAIS EXPRÈS ? HEIN ? DIS-MOI !

Tori leva les yeux ciel. Et ça y eeeest, c’est partiii. Elle allait continuer à beugler comme une sagouine pendant pas mal de temps. En fait, si elle avait eu un tonneau sous la main elle aurait fini sa tirade en les assommant mais visiblement, les gamins normaux ne buvaient pas de bière ni de rhum. Dommage. Oui mais non. C’était la première fois qu’elles rencontraient un autre Tatris, un mioche qui plus est, tout chou, alors elle n’allait pas laisser passer ça. Elle jeta un coup d’œil à Corback, qui, sensible à l’humeur de ses maîtresses, battait furieusement des ailes. Keep cool. Elle tourna sa tête vers celle d’Alba, l’air déterminée, terrorisée à l’intérieur. Quand elle était dans cet état, Dieu seul sait ce qui pouvait arriver.

- Alba, s’il te plaît, ta gueule.

Sous le choc, la demoiselle s’arrêta net. Attends un peu, retour en arrière. Elle avait osé l’interrompre ? Là, devant un public terrorisé ? Comme si elle n’était rien de plus qu’un vulgaire tournesol ? Hébétée, elle fixait sa sœur d’âme, pas très sûre de ce qu’elle devait faire. L’adrénaline était tombée aussi vite qu’elle était arrivée, et déjà, l’autre enchaînait.

- Faites pas attention, vous l’avez vexée. Mais elle a pas tort, vous êtes un peu cons. Vous savez le nombre de jours que ça va vous prendre pour arriver au Lancovit sur ce rafiot ? Sur la Mer des Orages en plus ? Vous voulez crever, y a pas photo. Je sais pas, quitte à se barrer, autant réfléchir non ? Venez, on va vous avancer. Puis on avait pas vu d’autre Tatris avant, c’est drôle. Pis vous me parlerez de Tatran. Et vous fera goûter du rhum – quelle honte, naviguer sans rhum !

Alba nota que les yeux de Tori brillaient. Elle est surexcitée… Elle soupira discrètement, puis sourit. Elle aussi.


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Spoiler:

T’es plutôt vanille ou chocolat ?

Le Corbeau et le Canard

« En fait, vous êtes encore moins normales que nous. » La Tatris eut un sourire amusé. En effet, elles n’étaient pas particulièrement banales. M’enfin ils n’étaient pas en reste. Se balader sans rhum, bière ou autre alcool random, quelle idée ! « T'es d'accord ? - Euh... Ça a l'air drôle. - Parfait, on est partants. - Attends ! Vous nous promettez qu'on ne se fera pas embrochés par vous et vos matelots, hein ? » Il s’était tourné vers elles, l’air vaguement inquiet. Elles furent surprises de sa réaction – ou tout du moins Tori, puisqu’Alba était encore vexée. La brunette ébouriffa les cheveux du gamin en riant, songeant que cela était en réalité une réaction parfaitement naturelle puisqu’elles étaient censées être de vilaines pirates sanguinaires. Bouh. Bien que sa jumelle d’âme leur lança un regard mauvais, Tori leur fit un grand sourire, et c’est d’un ton bourru qu’elle leur assura que fichtre non, ça salirait l’Arcadia !

La Tatris les entraîna bon gré mal gré jusqu’au bateau, sous les regards curieux de l’équipage. Faut dire que le canard géant faisait de l’effet. Corback, sentant qu’il n’y avait plus de danger, s’était retiré sur le mât, fixant de ses yeux froids les petits bonhommes. Un coup d’œil de Leo suffit à le rassurer. Ils n’étaient pas un danger potentiel, et encore moins d’éventuels rivaux. Il les salua de la main, remontant tranquillement sur la navire, faisant fi de son caleçon bleu ciel qui lui collait à la peau. Et c’est donc en l’admirant que Tori se rendit compte qu’elles-mêmes étaient en maillot de bain, et qu’Alba ne changerait pas ça. Elle soupira.

« Mes amis, je vous présente nos nouveaux compagnons de bord, Will & Tom, ainsi que leur ami Kaloo, qui est très gentil et ne mords pas. – Vous le faites pas griller à la broche quoi, pigé ? » râla Tori. Alba approuva silencieusement, tandis que l’équipage accueillait joyeusement le jeune Tatris de a manière la plus simple qui soit : avec deux chopes de bière.

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